Au-delà de la prostitution sous contrainte

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mardi 15 novembre 2011

« Pas l'usine comme chez Dodo »


Ancienne prostituée, D. a croisé la route du proxénète Dominique Alderweireld, alias « Dodo la Saumure ». Aujourd'hui à la tête de son propre établissement, elle estime avoir gravi les échelons. ...
Fait rare, elle a fait toute sa « carrière », comme elle dit, avec son vrai prénom. « Je ne me suis jamais cachée, même si mon père a toujours préféré dire aux gens que j'étais assistante sociale », explique-t-elle.
Pourtant, pas question de donner son nom, encore moins celui de son établissement sur la vitrine duquel il est écrit « massage relaxation ». « Je fais ma pub dans mon coin. Je ne veux pas montrer ma tête dans les journaux comme Alderweireld. À force de donner des coups de pied dans la fourmilière en clamant qu'il contournait la loi, les fourmis l'ont dévoré... » D. est atypique. Dans son bar, égayé par des plumes et des photos de bimbos dénudées jouant dans le sable mouillé, cette quinquagénaire élevée par des professeurs de français à Genève, papote avec certains habitués du dernier bouquin de Jean d'Ormesson. D'autres montrent les photos de leurs enfants ou petits-enfants à celle qui est aussi devenue mère et grand-mère... « La prostitution touche tous les milieux sociaux, aussi bien chez les clients que chez les prostituées, vous savez », sourit-elle.
D. a commencé « en bas de l'échelle » : dans les vitrines de Bruxelles. « Mais pas tout en bas non plus(sur le trottoir) car j'avais trop de respect pour moi. » Ensuite, elle a fait ses classes chez Dodo. Sur lui, elle dira juste que « c'est un beau parleur ». Et que « chez moi, c'est l'inverse de chez lui. Lui, c'est le modèle espagnol : l'usine.
» De 2000 à 2011, dans les 19 établissements de Dodo, près de 250 noms de prostituées ont été retrouvés, de 18 à 40 ans, d'une quinzaine de nationalités (notre édition du 5 novembre). Chez D., « ce ne sont pas les mêmes policiers que chez Dodo qui effectuent les contrôles... » Comprendre que ce ne seraient pas les mêmes petits arrangements ?
D. ne se voit « pas comme une mère-maquerelle » mais « plutôt comme une assistante sociale » : « Mon père avait un peu raison, puisque les filles m'appellent "maman" ! » Elle assure les loger, les protéger des « dangers » qui les menacent, les conseiller aussi sur le look le plus efficace... Habituée à désamorcer les situations qui pourraient mal tourner, elle ouvre elle-même la porte aux clients, dans une tenue décontractée, avant de présenter ses « employées » âgées de 18 à 37 ans. En plus de son échelle de valeurs, D. se sent investie d'une mission : « On est le tampon entre la société et les envies... » Mais D. regarde sa montre. « Il faut que je vous laisse, il est l'heure de dîner : je mange avec les filles », dit-elle en montrant le rideau au fond du bar.

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